La nature du problème
La moisissure (schimmel) est un problème répandu dans de nombreux logements néerlandais, une conséquence directe du climat humide du pays et d’un parc de logements comprenant de nombreux bâtiments plus anciens, mal isolés. Pour un locataire, découvrir une moisissure n’est pas seulement un inconvénient esthétique ; cela représente un danger potentiel pour la santé et une question juridique importante. Contrairement à certaines juridictions où un bailleur peut disposer d’un formulaire de « divulgation de moisissure » à signer, le système néerlandais gère cela dans le cadre d’un concept bien plus large et puissant : l’obligation fondamentale du bailleur de fournir un bien exempt de défauts. Le terrain de combat, par conséquent, n’est pas ce qui a été divulgué, mais l’état objectif du bien et qui est responsable de son état. La présence de moisissure signale souvent des problèmes plus profonds tels que des fuites structurelles, une isolation insuffisante ou des systèmes de ventilation inadaptés, transformant une simple tache noire en un différend complexe sur la responsabilité.
Les locataires se retrouvent souvent pris dans un cycle frustrant. Ils signalent la moisissure, et la réponse initiale du bailleur est fréquemment de blâmer le mode de vie du locataire — affirmant qu’ils ne ventilent pas suffisamment le logement (niet genoeg luchten). Bien que le comportement du locataire puisse contribuer à une moisissure superficielle de condensation, une moisissure persistante ou répandue est presque toujours liée à une faille structurelle. Distinguer entre ces deux causes est l’enjeu central de nombreux litiges locatifs. La moisissure près d’une fenêtre est-elle le signe d’un locataire qui ne l’ouvre jamais, ou est-ce le signe d’un joint de fenêtre défaillant et d’un pont thermique ? Cette ambiguïté est souvent exploitée, forçant les locataires à devenir des experts en sciences du bâtiment simplement pour faire respecter leur droit fondamental à un environnement de vie sain.
Position légale : la moisissure comme un « Défect »
Selon le droit locatif néerlandais, plus précisément l’article 7:204 du Code civil (Burgerlijk Wetboek), un « défaut » (gebrek) est défini comme une condition ou une caractéristique du bien qui empêche le locataire d’en jouir comme il pourrait raisonnablement s’y attendre au début du bail. La moisissure tombe presque sans équivoque dans cette catégorie. Ce n’est pas quelque chose que le locataire attend ou doit accepter. À ce titre, l’obligation principale d’entretien (onderhoudsplicht) du bailleur s’applique. Le bailleur est légalement tenu de remédier au défaut, et cela signifie plus que simplement peindre par-dessus la moisissure. La solution doit s’attaquer à la cause profonde, que ce soit la réparation d’un toit qui fuit, la modernisation de la ventilation mécanique, ou l’installation d’une isolation adéquate.
Le Huurcommissie (Tribunal des loyers), un organisme neutre qui gère les litiges entre locataires et bailleurs dans le secteur social et du privé à bas loyer, tient un « livre des défauts » (gebrekenboek). Dans ce livre, la moisissure est classée comme un défaut sérieux de catégorie C s’il couvre plus de 0,25 mètre carré en raison de problèmes d’humidité liés à la construction. Cette classification officielle donne aux locataires une marge de manœuvre importante. Cependant, la charge de la preuve peut rester difficile. Un bailleur pourrait faire valoir que la moisissure est imputable au locataire, forçant ce dernier à démontrer une cause structurelle. Cela nécessite souvent de documenter largement le problème avec des photos, de la correspondance, et parfois même un rapport d’un inspecteur du bâtiment, transformant une demande simple de réparations en une bataille quasi-judiciaire.
Droits du locataire et excuses du bailleur
Lorsque un locataire découvre une moisissure, il doit agir méthodiquement. La première étape consiste à notifier formellement le bailleur par écrit, de préférence par une lettre recommandée (aangetekende brief), en détaillant le problème et en demandant une solution dans un délai raisonnable. Cette notification formelle est appelée un ingebrekestelling et constitue une étape juridique cruciale. Si le bailleur ne réagit pas, le locataire dispose de plusieurs options puissantes. Il peut engager une procédure devant la Huurcommissie pour demander une réduction formelle du loyer, qui peut être substantielle et rétroactive jusqu’à ce que le défaut soit corrigé. Pour un problème sérieux de moisissure, le loyer pourrait être réduit à aussi peu que 40% du prix original. Dans les cas extrêmes de risques pour la santé, le locataire pourrait faire appel au tribunal pour exiger des réparations immédiates ou même demander la résiliation du bail (ontbinding).
Cependant, les locataires doivent être préparés à l’empoit du contre-argument : que leur « comportement de vie » en est la cause. Les bailleurs pointeront des activités telles que la douche, la cuisine et le séchage du linge à l’intérieur comme sources d’humidité. Ils demanderont si le locataire aère le logement pendant au moins 15 à 30 minutes par jour et laisse les grilles de ventilation (ventilatieroosters) ouvertes. Bien qu’une bonne ventilation soit effectivement de la responsabilité du locataire, elle ne peut pas compenser des défauts structurels majeurs. Si la moisissure apparaît dans des endroits non affectés par la vie quotidienne, comme à l’intérieur d’un placard encastré sur un mur extérieur, cela pointe fortement vers un problème structurel. L’enjeu pour le locataire est de démontrer qu’il est un 'bon locataire' (goed huurder) et que le problème persiste malgré des efforts raisonnables de ventilation, ce qui place clairement la responsabilité sur le bailleur.